Les engelures : comprendre, prévenir et soigner le froid extrême

Les engelures : comprendre, prévenir et soigner le froid extrême

Au Québec, les hivers rigoureux ne pardonnent pas. Travailler ou pratiquer des activités à l’extérieur, particulièrement dans le vent, l’humidité ou à des températures sous zéro, expose la peau à un risque bien réel : les engelures. Bien qu’elles puissent sembler bénignes au premier abord, elles représentent une urgence médicale potentielle lorsqu’elles atteignent les tissus profonds. Comprendre les causes, les symptômes et les bons gestes à poser permet d’éviter des séquelles graves.


Qu’est-ce qu’une engelure ?

Une engelure est une lésion de la peau et des tissus causée par une exposition prolongée au froid intense. Lorsque la température corporelle chute localement sous 0 °C, les petits vaisseaux sanguins se contractent pour protéger le corps. Ce mécanisme de défense, appelé vasoconstriction, limite l’arrivée de sang dans les extrémités (doigts, orteils, nez, oreilles, joues). Résultat : la peau gèle partiellement et les cellules commencent à se déshydrater ou à mourir.

Selon la gravité, on distingue trois stades :

  1. Engourdissement superficiel (engelure de premier degré)

    • La peau devient pâle, froide et insensible.

    • Une sensation de picotement ou de brûlure peut apparaître lors du réchauffement.

    • Aucun dommage permanent si le réchauffement est rapide et bien fait.

  2. Engelure partielle (deuxième degré)

    • La peau devient blanche, cireuse et rigide.

    • Des cloques peuvent se former après le réchauffement.

    • Les tissus cutanés commencent à être endommagés.

  3. Engelure profonde (troisième degré)

    • La peau prend une teinte bleutée ou noire.

    • Les tissus sous-cutanés, muscles et os peuvent être atteints.

    • Risque d’amputation sans soins médicaux rapides.


Facteurs de risque

Les engelures ne surviennent pas uniquement par temps glacial. Le vent, l’humidité et une mauvaise isolation thermique augmentent considérablement le risque. Par exemple, une température de -10 °C accompagnée d’un vent de 40 km/h équivaut à un refroidissement éolien d’environ -25 °C.

Les personnes les plus à risque sont :

  • les travailleurs forestiers, de la construction, de la voirie ou des mines ;

  • les randonneurs, skieurs, chasseurs et amateurs de plein air ;

  • les personnes ayant une mauvaise circulation sanguine (diabète, tabagisme, maladie vasculaire) ;

  • celles qui consomment de l’alcool ou des drogues (diminution de la perception du froid).


Reconnaître les signes avant qu’il ne soit trop tard

L’engelure s’installe souvent sans douleur immédiate, ce qui la rend insidieuse. Les premiers signes à surveiller :

  • Sensation d’engourdissement ou de picotement ;

  • Peau pâle, cireuse ou rigide ;

  • Perte de sensibilité ;

  • Difficulté à bouger les doigts ou les orteils ;

  • Rougeur ou cloque après le réchauffement.

Une exposition prolongée peut aussi entraîner l’hypothermie, lorsque la température corporelle globale chute sous 35 °C. Dans ce cas, il s’agit d’une urgence vitale.


Prévention : la clé pour éviter les engelures

La CNESST et les guides de santé en forêt recommandent une série de mesures simples mais essentielles :

1. Bien s’habiller

  • Privilégier la technique des couches :

    • Couche de base : tissu synthétique ou laine mérinos qui évacue l’humidité ;

    • Couche isolante : polar, duvet ou laine pour conserver la chaleur ;

    • Couche extérieure : coupe-vent et imperméable.

  • Porter des gants doublés (ou mitaines par grand froid), des bas en laine, un couvre-chef, et protéger le visage et le cou avec une cagoule.

  • Éviter le coton : il garde l’humidité et accélère la perte de chaleur.

2. Protéger les extrémités

Les doigts, les oreilles et les orteils sont les premiers touchés.
Prévoir des gants de rechange secs et des semelles isolantes.

3. Rester au sec

L’humidité multiplie le risque d’engelure. Changer les vêtements mouillés dès que possible.

4. Limiter la durée d’exposition

Planifier des pauses régulières dans un abri chauffé.
En milieu forestier, un campement conforme au guide CNESST doit permettre aux travailleurs de se réchauffer entre les quarts de travail.

5. Surveiller ses collègues

Les engelures apparaissent souvent sans que la personne s’en rende compte. Un regard extérieur aide à les détecter rapidement.


Traitement : que faire en cas d’engelure ?

1. Éloigner la personne du froid

Amener la victime dans un endroit chaud et à l’abri du vent.

2. Retirer les vêtements mouillés

Remplacer par des vêtements secs, chauds et amples.

3. Réchauffer progressivement

  • Tremper la zone touchée dans de l’eau tiède (37 °C à 39 °C) pendant 15 à 30 minutes.

  • Ne jamais utiliser d’eau chaude, de feu, de radiateur ou frictionner la peau : cela peut aggraver les lésions.

  • Si les doigts ou orteils sont atteints, ne pas marcher dessus ni les percer.

4. Couvrir et protéger

Appliquer un pansement sec et stérile (gaze non adhérente).
Si plusieurs doigts sont atteints, les séparer avec des compresses.

5. Ne pas réchauffer si la zone risque de regeler

Le réchauffement suivi d’un nouveau gel cause des dommages irréversibles.

6. Consulter rapidement un professionnel de la santé

Toute engelure modérée ou grave nécessite une évaluation médicale.
Des soins avancés (pansements stériles, antibiotiques, oxygénothérapie) peuvent être requis.
Les pansements hydrocolloïdes ou à base de gel mentionnés dans le Guide des pansements de Plaies Canada sont parfois utilisés pour favoriser la cicatrisation.


En milieu de travail ou en forêt

Selon le Règlement sur les normes minimales de premiers secours et de premiers soins (A-3.001, r.10), tout employeur doit :

  • Assurer la présence d’un secouriste formé sur chaque quart de travail ;

  • Maintenir des trousses de premiers secours conformes à la norme CAN/CSA Z1220-17 ;

  • Prévoir un protocole d’évacuation et des moyens de communication efficaces (exigé en milieu forestier).

Une civière, des couvertures thermiques et des compresses chaudes doivent être disponibles pour éviter l’hypothermie lors d’une évacuation.


Conclusion

Les engelures ne sont pas qu’un inconfort d’hiver : elles représentent un danger réel pour la santé et la sécurité des travailleurs et amateurs de plein air. Prévenir vaut toujours mieux que guérir : bien s’équiper, se protéger du vent, rester au sec et surveiller les signes précoces sauvent littéralement des doigts… et parfois des vies.

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Pour plus d'informations sur les premiers secours en milieu de travail et les exigences de la CNESST, vous pouvez également consulter le site web de la CNESST : 

https://www.cnesst.gouv.qc.ca/fr/prevention-securite/secourisme-en-milieu-travail/materiel-premiers-secours

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